UN PEUPLE ET SON ROI

Pierre Shoeller, une approche renouvelée.

Après "l'Exercice de l'Etat" sa réflexion passionnante sur le pouvoir en République, Pierre Shoeller nous offre ici une lecture sensible de la période révolutionnaire. Pas grand-chose à voir avec les reconstitutions que nous avons vues jusqu'ici. Les années lumières et Les Années Terribles le très beau diptyque paru en 1989, était pédagogique et excellent. Ici, il s'agit de tout autre chose : nous tenir au plus près des gens du peuple dans ce moment de prise de conscience qui pourrait être une prise de pouvoir mais qui plonge chacun (chacune)  dans des abîmes en même temps qu'il  propulse les protagonistes sur des sommets. 

Le parti-pris esthétique d'éclairer à la bougie est sublime et on ne peut s'empêcher de penser aux tableaux de Le Nain. Mais la lumière du soleil qui envahit tout à coup le faubourg quand tombent les pierres de la Bastille, en même temps qu'elle symbolise l'espoir de liberté, est filmée de manière si sensuelle qu'on en ressent la chaleur jusque dans la salle obscure. 

Et c'est bien de cela qu'il s'agit : de trouver comment interagissent l'intime le plus profond et le public devenu politique. Les moyens qu'emploie Shoeller pour ce-faire, sont à la fois intelligents et sensibles : le verre brûlant que l'on souffle, les pieds nus, les enfants qui meurent et ceux qui naissent, la pluie d'octobre sur les femmes qui marchent sur Versailles, tout cela vous implique comme vous impliquent les discours tenus à l'assemblée puis à la convention. 

Les acteurs sont tous formidables, émouvants ou énigmatiques, ils sont la force et la faiblesse de l'Humain, ses espoirs, ses incompréhensions, ses désarrois, ses peurs. 

Inutile d'en dire plus : allez voir ce film étonnant, vous ne le regretterez pas.