Française, je suis, comme des millions d'autres, envahie ces derniers jours par une immense tristesse. C'est aujourd'hui que sortira des urnes le nom de notre futur président. Fin d'une période éprouvante, malsaine. La haine imbécile montée en épingle, attrape tout, miroir aux alouettes pour misérables sans espoir... L'énergie juvénile, inexpérimentée décidée à mettre à terre tout ce qui pouvait encore faire de la société française un ensemble solidaire... et aujourd'hui, l'obligation, la mise en demeure de choisir entre peste et choléra. Elire le moins pire, voilà à quoi nous sommes réduits depuis pas mal de temps, déjà. Et chaque fois que nous "évitons le pire" de justesse, nous retournons à nos petites affaires sans nous demander comment il se fait que nos élus ne réussissent pas regarder en face la situation réelle de gens qui nous mettent dans cette obligation.
Une grande tristesse, oui. parce que nous détestons nous sentir piégés, parce que ce piège semble le seul argument dont disposent nombre de "politiques", parce que notre avenir est sombre.
Du temps de ma jeunesse, la politique ne se pratiquait pas seulement au moment de l'élection présidentielle. Elle était une préoccupation de chaque instant. Les temps changent, évidemment. En passant de la frugalité obligatoire à la consommation effrénée, nous avons perdu de vue nos idéaux d'égalité et de fraternité. Reste la liberté, devenue valeur suprême et suprêmement individuelle. La roue tourne et tournera encore. Rien ne l'arrête.
Quand nous aurons perdu nos rêves, il nous restera la littérature - un peu - la poésie - beaucoup - et l'art absolument... à condition, bien sûr, que nous y ayons encore accès librement.