Cher Marcel,
Je me depêche de protester avant d'avoir disparu, émiettée, imbibée, flasque et informe au fond de ta tasse de thé. Franchement, lorsque ta grand-mère sacrifiait une de mes copines à l'heure du goûter quand tu étais enfant, elle aurait mieux fait de te donner du pain dur ! C'est vrai, ça. Des années plus tard, te voilà tout chaviré parce que je fonds dans ta bouche. Quelle histoire ! et en plus, tu n'es même pas foutu de te souvenir correctement: ta grand-mère, ce n'était pas une madeleine qu'elle t'offrait à quatre heures, c'étaient des petits Lu. (Lu, comme Lulu !) Evidemment, tu as préféré parler de Madeleine pour te camoufler, tu n'aurais pas osé évoquer franchement ton Lulu !
Tu n'es qu'un homo honteux; voilà ce que tu es.
En attendant, plus d'un siècle plus tard, chaque fois que quelqu'un présente des madeleines au moment du thé, tu peux être sûr qu'il s'en trouve toujours un pour dire: "Proust, alors !"
Mais voilà que je me dissous ... je te sal ...