Avec un roi faible à sa tête, le royaume était en danger à l'intérieur et surtout à l'extérieur. Il y avait des rois dans le voisinage qui lorgnaient sur le royaume des Burgondes avec des intentions impérialistes. Par exemple, Lüdegast, roi de Danemark et Lüdeger, roi de Saxe auraient volontiers annexé le royaume burgonde. S'ils ne le faisaient pas, c'était peut-être à cause de l'attitude politique de Dankwart, mais peut-être pas. Ce qui les retenait, c'était un homme, un seul: Hagen von Tronje.
Hagen avait réuni autour de lui une armée de valeureux guerriers comme Ortwin de Metz, Volker de Azley ou les comtes Gere et Eckewart. Ils étaient tous trois vassaux de Gernot, Gunther et Giselher, mais les ordres, ils les prenaient auprès de Hagen, non qu'ils aient refusé de leur obéir, mais les rois ne leur donnaient jamais d'ordres, trop contents qu'ils étaient de se faire remplacer par Hagen.
Mais Hagen étant le vassal de Gernot, Gunther et Giselher, il leur était évidemment soumis. l'ordre des choses ne pouvait s'inverser: toute chose était à sa place, place que l'on tenait de sa naissance, roi ou sujet. C'était un temps où on faisait très bien la différence entre roi et sujets. Toutefois, la vérité, c'est que Hagen dirigeait les affaires du royaume.
Ce Hagen von Tronje était un personnage remarquable et contradictoire., fameux dans toute l'Europe. Pour les uns, il était particulièrement cruel, choisissant toujours les voies les plus ardues et sans concessions. Pour d'autres, au contraire, il savait s'adapter merveilleusement à toutes les situations: un véritable diplomate. Son nom avait de l'éclat, c'est à dire que quand Hagen entrait quelque part, le silence se faisait; particulièrement à la cour des Burgondes. Hagen était impénétrable, imprévisible, même pour Gunther, Gernot et Giselher, mais il passait pour loyal et d'une intelligence supérieure. Hagen Von Tronje était la garantie que Worms ne serait jamais prise, en tout cas, pas tant que Lüdegast et Lüdeger ne seraient pas unis. Et non seulement ils n'étaient pas unis, mais ils étaient ennemis; et il se murmurait que l'hostilité entre eux était l'oeuvre d'un seigneur burgonde...
Les capacités de Hagen lui donnaient à la cour, une puissance incontestée. Chacun savait que sans lui, le royaume aurait été perdu. D'autres rois et princes étaient aussi intéressés que Lüdeger et Lüdegast, mais ils comptaient sur la méthode qu'on appela plus tard la méthode autrichienne: l'un ou l'autre disait:"Ce royaume ne peut être pris par la force, Hagen y veille, qui sait avec qui il a encore scellé un pacte. Il est capable de tout, même de pactiser avec le diable, mais si je convolais alors, ni son armée, ni ses valeureux guerriers, ni sa grandeur ne serviraient plus à rien."
Et c'est là qu'entre en scène Kriemhild !