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Des écrits poétiques et littéraires agrémentés de photos ou de tableaux et aquarelles... le monde sensible transfiguré par les mots et les couleurs.

Ah, mon père !

Publié le 2 Mars 2014 par Nicole Fack

En arrivant dans le square du quartier, j'ai été surpris de voir le nombre de gens qui m'attendaient. Mes compagnons étaient là, bien sûr, ainsi que leurs parents, mais il y avait aussi des voisins dont les enfants étaient plus jeunes ou plus vieux que nous et qui avaient entendu parler de nos exploits. Je ne savais pas si ces gens étaient hostiles ou non. Ils papotaient en attendant, ils ne paraissaient pas agités. A mon approche, le silence se fit, un demi-cercle se forma spontanément: on attendait que je prenne la parole. Je grimpai sur un banc afin de voir tout le monde et que tout le monde m'entende.

-Vous êtes là, tous ensemble, et je vous remercie. Vous le savez, nous avons saccagé hier l'odieuse boutique de souvenirs dans la cathédrale. C'était mon idée. Vos enfants n'y auraient pas pensé tout seuls, même si, comme moi, ils trouvent que le commerce n'a rien à faire dans la maison de Dieu, je suis donc responsable. Néanmoins, je ne ressens aucune culpabilité; cette action était juste. Mon Père qui est au ciel me l'a dictée, je n'ai fait qu'obéir. Notre société est trop avide d'argent, cela conduit aux pires injustices envers les petits comme vous. La finance fait de vous des esclaves, elle traite les hommes, créatures de Dieu, en chiens soumis et voraces. Vous perdez votre dignité, et l'évêque, qui devrait être parmi vous, pauvre parmi les pauvres, se fait des couilles en or en vendant des babioles horribles et blasphématoires aux gogos qui visitent sa cathédrale. Les politiques vous trahissent, vous le savez depuis longtemps, les prêtres doivent rentrer dans le droit chemin, se remettre en route à vos côtés pour gagner le paradis de mon Père. Des applaudissements nourris ont salué mon envolée, et puis, ça s'est mis à commenter dans tous les coins, avec des "il a raison" des "on se laisse trop faire" et puis une voix s'est élevée: laissez-moi passer. C'était le père Duciel qui se dirigeait vers moi. Il grimpa sur le banc et me prit par l'épaule.

-Je connais bien Chris. C'est un garçon sérieux et dévoué, mais il se trompe de cible, le clergé n'est pas corrompu comme il se l'imagine, l'Eglise est pauvre, vous le savez, elle est près de vous, c'est vous qui l'avez désertée depuis pas mal de temps. Revenez-y, reprenons les bonnes vieilles coutumes, vous verrez que tout ira mieux ! Il y eut comme un flottement. Les gens ne pratiquaient guère, il est vrai, mais ils aimaient bien leur curé, c'est quand-même lui qui accompagnait les morts au cimetière et qui mariait les jeunes gens... quand ils se mariaient... une femme dit:

-Si on ne vient plus à l'église, c'est parce que le clergé a toujours fait semblant de nous soutenir, tout en s'acoquinant avec les riches ! La parole de Dieu, là-dedans, on la cherchait! Je ne sais pas si Chris a raison, ce que je sais, c'est que l'action de nos petits nous a réveillés. Il était temps. Moi, je soutiendrai les prochaines entreprises menées par Chris. Nos gamins vont être condamnés à des travaux d'intérêt général pour rembourser l'évêque; bon; on les aidera. Et on empêchera que la boutique rouvre dans la cathédrale. Si l'évêque veut se faire épicier, il n'a qu'à ouvrir un magasin et payer patente, comme nous tous ! Une ovation salua la sortie. J'ajoutai:

-Merci à tous de votre soutien. Mon Père, au ciel, vous regarde et se réjouit de vous voir si décidés. Pensez à Lui souvent ouvrez-lui votre coeur, Il vous aime et moi, Son fils, je vous aime aussi.

Ah, mon père !
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