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Des écrits poétiques et littéraires agrémentés de photos ou de tableaux et aquarelles... le monde sensible transfiguré par les mots et les couleurs.

Ah, mon père ! (suite du feuilleton)

Publié le 20 Février 2014 par Nicole Fack

C'est peu de temps après que l'événement s'est produit. Je sortais du lycée quand je remarquai un attroupement à quelques mètres de là. Ça vociférait, ça gesticulait; j'aurais passé mon chemin, mais j'ai entendu une voix féminine qui hurlait. Il m'a semblé reconnaître cette voix, alors, je me suis approché. Avec beaucoup de difficultés, j'ai réussi à me glisser au premier rang du cercle déchaîné, et là, j'ai vu Mado, ma Mado, tenue par deux grands gars, qui se débattait pendant que le groupe de mecs lui envoyait des injures, la traitant de pute, de salope, et la menaçant des pires sévices. J'ignore ce qui m'a pris. Je n'ai pas réfléchi. Moi qui n'osais parler à personne, je me plaçai au centre du cercle et demandai de quoi il retournait:

-Ta cousine est une salope, elle m'a fait cocu, dit un grand gaillard qui habitait notre quartier, mais à qui je n'avais jamais parlé, elle ne se gène pas pour baiser avec mes potes et me ridiculiser. Maintenant, plus personne ne me prend au sérieux. Je dois la punir. Les autres se mirent à parler tous ensemble: eux aussi, ils étaient cocus, déshonorés, sans compter que l'autre, le chef de la bande, il allait se retourner contre eux dès que Mado aurait expié... Je levai la main pour demander le silence. C'était si inattendu de ma part, que tout le monde se tut.

-Vous voudriez que Mado soit fidèle, qu'elle vous considère comme des dieux, qu'elle marche les yeux baissés, pas vrai? (un murmure parcourut l'assemblée) mais vous êtes tous bien contents de la trouver quand une envie vous prend, je me trompe? (autre murmure) vous voulez tous sauter les filles, mais vous voulez en même temps que les filles ne se fassent pas sauter! Il y a une faille dans votre raisonnement, les gars. Le mieux, pour vous éviter de devenir aphones, et d'attirer les flics par dessus la marché, c'est de réfléchir ensemble à ce qu'il convient de faire. (Mado, qui avait souri en me voyant intervenir, se rembrunit) Voilà, dis-je, je propose que celui, parmi vous, qui n'a jamais fait de conneries, qui n'a jamais eu deux copines à la fois, qui n'a jamais caressé Mado ou une autre, qui n'a jamais dit de mal de personne, qui n'a jamais dealé du chit, je propose que celui-là s'avance et lui crache à la figure. Silence de mort. Les gars regardent obstinément la pointe de leurs chaussures. Mado se redresse, se secoue légèrement et les types qui la tenaient la lâchent.

-Allons, je continue, lequel d'entre vous est un modèle de conduite? Qu'il s'avance! Ça grommelle dans le cercle des excités. Le Pierrot est le premier à faire demi-tour et à quitter les lieux en traînant les pieds. Deux autres haussent les épaules et le suivent, marmonnant des sons informes. Bientôt, il ne reste plus que l'accusateur principal qui se décide à rejoindre sa bande, la tête basse: Il va avoir du mal à retrouver son trône, le roitelet! Mado se jette sur moi et m'embrasse sur les deux joues avec effusion. Merci Je me mets à trembler à retardement, l'émotion me submerge, à vrai dire, je n'en reviens pas de mon audace. Je ne te croyais pas capable d'un truc pareil! dit-elle... moi non plus!

- On va se promener à la rivière? Sacrée Mado !

Ah, mon père !   (suite du feuilleton)Ah, mon père !   (suite du feuilleton)
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