Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
nicolavignon.over-blog.com

Des écrits poétiques et littéraires agrémentés de photos ou de tableaux et aquarelles... le monde sensible transfiguré par les mots et les couleurs.

Rosita Boisseau rend hommage à Amélie.

Publié le 2 Janvier 2021 par Nicole Fack in Actualité

 ce qu'elle a toujours eu, c'est la beauté !

ce qu'elle a toujours eu, c'est la beauté !

 

 PARU DANS "LE MONDE" LE 22 DÉCEMBRE DERNIER. 

Amélie Grand, figure de la danse contemporaine, est morte

Créatrice puis directrice pendant plus de trente ans des Hivernales d’Avignon, elle a su allier la danse au théâtre et à la chanson, articulant la programmation avec des cours et des ateliers. Elle est morte le 17 décembre, à l’âge de 84 ans.

Par Rosita Boisseau

Publié le 22 décembre 2020 à 17h41

 

Temps de

  •             Lecture 4 min. FavorisAjouter aux favorisPartage
  •             Partager sur Facebook
  •             Envoyer par e-mail
  •             Partager sur Messenger
  •             Plus d’options

 

Article réservé aux abonnés

 

Amélie Grand a créé puis dirigé le festival Les Hivernales d’Avignon, de 1977 à 2009. GUY DELAHAYE

Lumineuse, offensive, Amélie Grand attirait l’attention par sa seule énergie rayonnante et le sourire qui allait avec. Cette personnalité majeure de la danse contemporaine depuis le milieu des années 1970, à la tête du festival Les Hivernales d’Avignon, de 1977 à 2009, n’a eu de cesse de soutenir les danseurs et les chorégraphes pour les faire grimper en haut de l’affiche. Elle est morte jeudi 17 décembre, chez elle, à Mouriès (Bouches-du-Rhône), entourée de Julia Grand, la fille qu’elle eut de son mariage avec le sculpteur Toni Grand (1935-2005), et de ses amis musiciens, qui l’ont accompagnée jusqu’au bout avec des concerts à la guitare et à l’accordéon. Elle avait 84 ans.

Amélie Grand est né, le 17 juillet 1936, aux Sables-d’Olonne (Vendée). Ultrasportive, elle sort diplômée de l’Ensep (Ecole normale d’éducation physique), tout en s’aventurant, avec l’ardeur qui était la sienne quoi qu’elle fasse, dans des spectacles de théâtre et de cabaret. Elle donnait encore son atelier chansons à Avignon avant la crise sanitaire. « La danse perd une vibrante dame, confie le chorégraphe Dominique Dupuy. L’histoire d’Amélie Grand, folle de chansons, qui laisse d’un coup ses grandes amours pour se consacrer pendant des années corps et âme à la danse à laquelle elle fait vivre une aventure des plus singulières, dont je suis fier d’avoir été un des premiers héros, est incroyable. La chanson ne l’ayant pas quittée, Amélie Grand, à sa sortie des Hivernales, a rempilé, chantant et rechantant à qui mieux mieux. Ceux de la danse cependant ne pourront oublier cette convaincue, concoctant dans sa ville aux couleurs du théâtre, des moments de danse fulgurants pour lesquels elle inventa le beau titre tout en blancheur des Hivernales. »

Amélie Grand : « On était juste une bande d’amis qui a soudain eu une idée folle : organiser une semaine de danse dans la ville du théâtre »

En 1960, à Paris, sa passion toute fraîche pour la danse contemporaine se muscle auprès de la chorégraphe allemande Karin Waehner (1926-1999), nourrie d’expressionnisme, puis se diversifie au gré de différents stages. Cinq ans plus tard, Amélie Grand commence à enseigner la danse à l’université de Nanterre. Elle collabore, à partir de 1968, avec le metteur en scène Gabriel Monnet, au Théâtre de Nice, tout en dirigeant des formations en danse pour les classes préparatoires au professorat d’éducation physique. Elle est nommée conseillère « danse et théâtre » à la direction départementale de la jeunesse et des sports du Vaucluse en 1974.

Dans la foulée, elle ouvre les premiers cours de danse contemporaine à l’université d’Avignon, puis lance la Semaine de danse d’Avignon, en 1977. Ce qui va devenir le festival Les Hivernales d’Avignon, toujours dans la course, à l’enseigne depuis 1996 du Centre de développement chorégraphique pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, prend son élan. « On était juste une bande d’amis qui a soudain eu une idée folle : organiser une semaine de danse dans la ville du théâtre, rappelait en riant Amélie Grand, en 2018. J’avais envie de faire aimer cet art et j’ai appris sur le tas à construire et diriger ce qui est devenu un festival. »

« Une femme forte »

En lutteuse, elle va imposer l’art chorégraphique dans une ville dédiée dévolue historiquement au texte et au théâtre. « C’était une femme forte qui a su tisser des liens avec d’autres partenaires institutionnels et tenir tête aux politiques pour affirmer la présence de la danse, commente Isabelle Martin-Bridot, directrice des Hivernales depuis 2017, qui a collaboré avec elle dès 2004. C’était aussi une artiste qui savait être à l’écoute des danseurs et leur parler. »

L’identité de cette manifestation s’appuie sur les différentes passions d’Amélie Grand pour brosser une vision populaire, multicolore et joyeuse de la danse contemporaine, les bras grands ouverts au théâtre, à la chanson, au rire. L’idée forte des Hivernales : articuler la programmation des artistes avec des cours et ateliers. « Il ne s’agit pas de consommer mais de construire une culture. Les chorégraphes diffusés donnent obligatoirement une semaine de cours à des débutants ou à des professionnels qui vont assister à des représentations le soir », expliquait-elle lors d’une rencontre en 2001.

Aux Hivernales d’Avignon, on trouve un savant équilibre entre signatures repérées et jeunes pousses

D’où une communauté de passionnés faisant bouillir la marmite de la danse contemporaine du matin au soir dans la cité des Papes. On y croise, dans un savant équilibre entre signatures repérées et jeunes pousses, Elsa Wolliaston, Susan Buirge, Maguy Marin, Daniel Larrieu, Mark Tompkins…, mais aussi Yvann Alexandre, Hamid Ben Mahi, la compagnie Naïf Production…

Toujours au taquet, Amélie Grand lance, en 1997, Les Hivernales en été, et parallèlement le programme Sujet à vif, en complicité avec le Festival d’Avignon. En 2000, dans le cadre d’Avignon « ville européenne de la culture », elle met en œuvre un réseau qui relie Avignon avec des institutions de Bergen, Bologne, Bruxelles, Cracovie, Helsinki, Prague, Reykjavik, pour faire tourner dix compagnies sélectionnées dans ces différentes villes à l’enseigne d’un festival itinérant intitulé Trans Danse Europe 2000. « Amélie était une personnalité avec de l’autorité pour défendre la danse contemporaine, se souvient Bernard Faivre d’Arcier, directeur du Festival d’Avignon de 1980 à 1984, puis de 1993 à 2003. On a beaucoup collaboré ensemble et je lui demandais régulièrement conseil. C’était une excellente partenaire de travail. Elle savait résister à la mollesse du milieu avignonnais et s’est révélée une bonne tacticienne pour bâtir son festival. Elle était réaliste et idéaliste en même temps. »

Amélie Grand en quelques dates

17 juillet 1936 Naissance aux Sables-d’Olonne (Vendée).

1977-2009 Crée et dirige le festival Les Hivernales d’Avignon.

1997 Lance Les Hivernales en été.

2000 Met en œuvre un réseau qui relie Avignon et des institutions de Bergen, Bologne, Bruxelles, Cracovie, Helsinki, Prague, Reykjavik.

17 décembre 2020 Mort à Mouriès (Bouches-du-Rhône).

 

Rosita Boisseau dans  le Monde  le 22 décembre 2020

 

 

 

 

Commenter cet article