Un silence extrêmement concentré témoigne pendant plus de deux heures de l'attention du public. Si les questions absurdes posées par les jeunes filles du choeur font sourire, la tragédie pourtant bien connue, captive. Il en va ainsi des grands récits fondateurs de civilisation.
Martin Krimp relit Les Sept Contre Thèbes et nous, des siècles et des siècles plus tard, nous retenons notre souffle. C'est qu'il s'agit ni plus ni moins de conception de l'Etat, d'accueil ou non, d'alternance ou non, de devoir ou de sentiments... ne manque pour être vraiment actuel que la corruption !
Dominique Reymond campe une Jocaste extraordinaire : souffrance et retenue, la classe absolue. Ses deux fils s'entretueront pour le pouvoir, l'un revendique la parole donnée, l'autre, la continuité de l'Etat. Elle en mourra et sa fille, Antigone incarne pour toujours le conflit majeur de l'Homme social.
Dommage que Jeanneteau ait fait d'Eteocle une sorte d'histrion attaché à son pouvoir par pur désir de domination. Le personnage est plus complexe en ce qu'il renvoie à la raison d'Etat. Le jeune garçon qui joue Ménécée, fils de Créon est parfait.
Même si l'on peut regretter que l'énergie se perde un peu dans la deuxième partie de la pièce, on là une belle réussite.