JOUEURS, MAO II, LES NOMS (Julien Gosselin)
Gosselin, on le sait, aime les formats longs et les textes romanesques. Ici, dix heures pour trois romans de Don Delillo, ce romancier hors normes, hyper-réaliste quant à ses intrigues et préoccupé par le style, voire la poésie. C'est peu de dire que les romans écrits dans les années soixante dix et qui tournent autour du terrorisme ont une forte résonance aujourd'hui. Que le décorticage de la finance mondialisé nous concerne, que les mouvements sectaires nous inquiètent. Plus étonnant est la langage utilisé et le jeu incessant avec et sur les mots, au point d'en arriver à une hypothèse folle : et si tout cela ne tenait qu'aux mots et à leur usage ?
Un tel propos engendre une forme bien particulière et qui peut dérouter : le réel médiatisé par le langage dans les romans est ici filtré, voire perverti, par le film. Les comédiens jouent, mais nous les voyons jouer à distance et travers l'objectif (très subjectif) de la caméra.
On l'aura compris, un tel spectacle n'est pas fait pour les spectateurs paresseux; il demande beaucoup d'attention et une présence active. Les comédiens sont exceptionnels, la mise en scène exigeante, les lumières subtiles ... Cette jeune génération est particulièrement intéressante !