diaporama "Place des Héros"
Le compagnonnage entre Lupa et Thomas Bernhard est déjà ancien. Cette fois, il s'agit de monter "Place des Héros", une pièce qui met en scène une famille d'intellectuels juifs éprouvée par le deuil dans une Autriche de plus en plus tentée par le retour à ses vieux démons: le nationalisme primaire, l'antisémitisme imbécile et la mesquinerie érigée en principe de vie. La famille en question à longtemps vécu à Oxford, mais est finalement rentrée en Autriche avec le projet de se réinstaller dans le village de l'enfance. En attendant, la mère entend les vociférations d'Hitler ovationné par la foule et le père, meurtri, se suicide...
Il s'agit, comme toujours dans les pièces de Brenhard, de conversations plus ou moins ironiques opposant ceux qui pactisent en courbant l'échine et attendent que ça passe à ceux qui voudraient au moins qu'on soit capable de signer une pétition contre la spoliation. Tout cela est furieusement pessimiste, très bien joué par les comédiens du théâtre national de Lituanie. La mise en scène étire le temps à l'extrême et manque de ruptures de rythme, ce qui fait que tout est sur le même plan. Sans doute est-ce pour corroborer ce que dit Bernhard, que l'Autriche a une étonnante faculté de supporter tout (y compris l'horreur) en restant d'humeur égale. Mais ceci ne va pas sans entraîner un certain ennui chez le spectateur.
Le précédent spectacle de Kistyan Lupa que j'ai vu, c'était "Des arbres à Abattre" du même Thomas Bernhard et je l'avais trouvé génial, mais il s'agissait d'une adaptation de roman, un texte foisonnant, mêlant plusieurs thèmes et une vaste réflexion sur le temps, l'art, la radicalité et les compromissions... Cette fois, je m'avoue déçue.