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Des écrits poétiques et littéraires agrémentés de photos ou de tableaux et aquarelles... le monde sensible transfiguré par les mots et les couleurs.

Rue du Chapeau Rouge (encore une histoire de Philonarde)

Publié le 14 Juin 2014 par Nicole Fack in fantaisie

Petite et tortueuse, la rue du Chapeau Rouge comporte pourtant des boutiques actives et des architectures de belle facture. Le promeneur y peut garder le nez au vent, l'oeil accroché aux fenêtres et aux portails: peu de risques de se voir dérangé par une voiture arrivant à grande vitesse. La rue du Chapeau Rouge est tranquille et les conducteurs prudents.

Philonarde aimait quitter l'active rue Carnot pour suivre cette voie discrète et déboucher comme par inadvertance à proximité immédiate de la place Pie où sont les Halles. Evidemment, de Chapeau Rouge, elle n'avait que le nom. Personne ici ne portait de couvre chef. Personne non plus n'en vendait. Encore une histoire ancienne, sans doute.

Philonarde, ce jour-là, était allée aux halles pour y prendre quelques légumes. Elle rentrait donc chez elle, tenant dans sa main droite son panier dont le poids la courbait un peu de côté. C'était l'hiver, un hiver provençal, ensoleillé mais venteux. Le mistral poussait devant lui les feuilles mortes et les sacs en plastique. Les cyclistes se voyaient tantôt propulsés à grande vitesse, tantôt stoppés net, selon qu'ils allaient vent arrière ou vent debout. Se dirigeant vers le Nord, Philonarde avait donc à lutter contre le vent pour avancer, et se voyait parfois bloquée par une rafale. Arrivant Place Pignote, elle fut prise dans un tourbillon et encerclée de feuilles de platanes et de poussière. Elle se plaqua contre un tronc énorme en attendant que s'apaise le coup de vent.

C'est alors qu'au milieu du sifflement éolien, elle entendit un cri, puis le bruit d'une course rapide. Elle sortit le nez de derrière son refuge et aperçut, volant au vent, un objet de tissu rouge.

-Arrêtez-le, arrêtez-le ! criait la voix essoufflée qui, sans nul doute, appartenait à celui qui courait dans la rue. Trop tard. Philonarde n'eut pas le temps de tenter même un geste. Le chapeau rouge passa son chemin. Un instant à peine, et le propriétaire débouchait à son tour. Un seigneur du Moyen Age ! tout de rouge vêtu, même les bottes, qu'il avait magnifiques. Le manteau rouge, drapé sur l'épaule, volait autour de lui sous l'effet conjugué de la course et du mistral. L'homme, de belle stature, arborait une abondante chevelure blonde. Jean Piat dans les Rois Maudits, se dit Philonarde qui n'en croyait pas ses yeux... Ou bien le Comte d'Artois ! Evidemment, si ce dernier avait vécu ici, ou y était simplement passé pour y ourdir un de ses ineffables complots, il avait dû laisser un souvenir impérissable. L'homme rouge ne pouvait que frapper les esprits, surtout les jours de mistral, quand il était obligé de renoncer à ses manigances, pour courir derrière son somptueux chapeau...

Rue du Chapeau Rouge (encore une histoire de Philonarde)Rue du Chapeau Rouge (encore une histoire de Philonarde)
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